A tout ce que j'aurais aimé oublier. A tout ce qui a perduré ce malgré une envie des plus tenaces de tout effacer. En hommage, peut être, à ce qui ne disparait pas et ce, malgré de nombreuses tentatives. En hommage à ces sentiments, à ces réminiscences. A mon besoin, presque sadomasochiste, de vouloir garder intact ce qui écorche, ce qui blesse, ce qui meurtrie. En hommage à... Toi.
samedi 11 septembre 2010
mercredi 10 mars 2010
Nobis in Memoriam… « En mémoire de nous… »
Synopsis : Ambre Ben Yedder décède subitement… Martine, sa meilleure amie, est alors soupçonnée d’homicide volontaire par le commissaire Omar Ben Othman, homme d'expérience et proche de la retraite, qui réussi grâce à ses relations à se faire confier l’enquête. Celle-ci est rendue d’autant plus ardue à cause des tragiques évènements qui se déroulent au même moment en Tunisie...
Biographie : Mouna TOUJANI, une personnalité partagée entre force et faiblesse, entre colère et amour. Elle a écrit son premier Roman intitulé « Le combat de toute une vie » et un second naîtra quelques mois plus tard, ce besoin d’écriture est plus que vital pour elle, c’est une forme de thérapie. Sa plume n’a d’égale que sa quête d’authenticité et sa capacité d’aller aux risques d’elle-même! Fragile comme la feuille à l’arbre ! Forte comme les racines qui le portent! Lire ses livres, c'est apprendre à la connaître et c'est aussi, parfois, se retrouver face à ses propres démons…
Préface 1 : les gens sans histoire… Ne peuvent pas en raconter.
C’est en trempant sa plume dans les souffrances, les blessures et les douleurs de son passé que Mouna Toujani parvient, une fois de plus, à nous émouvoir, à nous toucher au plus profond de notre cœur et de notre âme, par la sensibilité de ses mots et par sa manière de raconter.
La souffrance peut parfois engendrer la colère, la haine, le sentiment de révolte, mais elle peut aussi, au contraire, ou conjointement, décupler l’Amour. Ou plus exactement, la perception de l’Amour.
Mouna Toujani, de toute évidence, aime l’Amour… Et l’Amour l’aime… Voilà pourquoi, elle en parle si bien…
Mais quand l’Amour devient Passion… Le drame n’est jamais loin…
Drame, Amour, Passion… Trois mots qui lui collent à la peau…
Vous aimerez la lire, et vous aimerez la (re)découvrir. Parce que personne ne peut rester insensible, face à tant de… Sensibilité…
Philippe Brion
Préface 2 : il en va en matière de découverte pour l’écriture, comme pour la peinture !
Je ne parle pas de l’œuvre mais de l’auteur.
Cela revient au même mais suivez mon raisonnement.
Si je devais découvrir Picasso, sachant ce qu’il est devenu ou si j’avais assez de discernement pour savoir avant qu’il soit reconnu ce qu’il deviendra, que ferais-je ? Que feriez-vous ?
J’achèterai tous ses tableaux pour être le premier. D’abord orgueilleusement pour dire : “c’est moi qui l’ai découvert” ensuite parce que je serais convaincu de ce qu’il va rapporter.
Le talent n’est pas toujours anticipé.
Il ne vaut parfois que parce qu’il est bien entouré.
Mais aujourd’hui il ne peut nous échapper car la propagation de l’information sur Internet révèle le savoir faire en faire savoir.
Moi j’ai vu sur les réseaux sociaux que l’auteur ne laissait personne indifférent ! Plébiscitée par ceux qui la découvrent, aimée par ceux qui la suivent.
Qu’il s’agisse de ses poèmes ou de ses romans, chaque ligne est une corde de guitare à la Manitas del Platas, chaque récit est digne des grands dignitaires romanciers.
Avec elle, homme ou femme, quelque soit leur aventure personnelle revive leurs émotions intérieurs, sorte de jardin de l’âme.
Mouna Toujani détient le secret de ces âmes et porte en elle la fibre de la sensibilité parfaite qu’elle traduit avec ses mots, et ses maux sont les nôtres.
Ce Roman est encore un moyen de nous piéger parce que dès que vous en aurez commencé la lecture, votre affect s’en ressentira et vous aurez la boulimie de la lire...Mouna Toujani…
Robert Benitah
Petit extrait:
- Robert, j’ai quelque chose de très important à te donner… Assieds-toi et écoute-moi parce que toute ta vie va sûrement changer après ça ! Elle l’a écrit pour toi. C’est tout ce qu’elle n’a jamais pu te dire…
Je lui tendis le livre : « En mémoire de nous » en était le titre. Il me regarda, surprit, et le prit de ses mains tremblantes. Le frôlant du bout de ses doigts, l’ouvrit après avoir jeté un bref coup d’œil à la couverture et, bredouillant, et commença à lire à haute voix la première ligne manuscrite qu’elle avait écrite à l’intérieur :
Cher Robert,
Ma vie a perdu de son attrait le jour où j’ai appris qu’il
ne me restait plus beaucoup de temps… Et quand la joie ne nous entoure plus,
quand tout devient fade, sans goût, sans odeur, sans sensation... Quand les
souvenirs sont tout ce qu'il nous reste, ce qui vous rattache au passé, aux
regrets, aux envies, à l'amour... Lorsqu'il ne reste plus que cela, tout ce
qu'il y autour ne compte plus... Les souvenirs se focalisent sur cette voix, ce
visage, ce corps, ces mots, ces gestes... Ces preuves, ces envies, ces cris, ces
pleurs. Oui les souvenirs ne se focalisent que sur ça. Les causes de l'amour.
Je n'ai nullement pris la décision de tout occulter, de ne
garder que certains détails, d'omettre les futilités, l'inutilité. Je n'ai pas
choisi les souvenirs, je n'ai pas fait le tri, je n'ai pas gardé que le
meilleur ou son inverse. Je n'ai pas voulu tout ranger dans un coin de ma
mémoire, je n'ai pas voulu fermer à double tour ce coffre dans lequel ce nous
était négligemment disposé. Je n'ai pas fait abstraction de nos habitudes, de
notre mode de vie et de tous ces détails qui prouveraient au monde entier
l'immensité de mon amour. Je n'ai pas fait la part des choses, j'ai laissé ces
souvenirs m'habiter, certains se sont effacés, d'autres ont perduré...Le
nécessaire, l'utile a persisté... Quant aux futilités, aux inutilités, aux
détails ne te concernant pas ils se sont envolés... Seul ton visage est resté,
chose immuable, bouleversante addiction... Mais sache Robert, que je pourrais
retracer chaque jour, chaque minute, chaque seconde s'il le fallait... Si tu
avais eu besoin que je parte à l'investigation de souvenirs, de détails,
d'habitudes, de mimiques pour connaître l'ampleur de mon amour, je l'aurais
fait. Je peux le faire... Je vais le faire…
« Je me souviens de toi comme une brise de vent doux qui a
doucement caressé ma vie. Tu as soufflé sur elle toutes les émotions qui m’ont
fait renaître. Femme, je me suis senti auprès de toi : Femme transportée
par le tourbillon de l’amour. Je me souviens de cette sensation de bien-être
quand j’étais blottie aux creux de tes bras. Je me souviens de ce sentiment de
sécurité et de cette force que tu dégageais quand tu me serrais contre ton
cœur. Il n’y a qu’à cet endroit que je trouvais la sérénité. Tu as été le père,
le frère, l’ami, l’amant… Tous ces sentiments qui m’avaient manqué depuis ma
plus tendre enfance. À toi seul tu as comblé tous ces vides. Quelques mois de
bonheur dans toute une vie. Dans mon cœur et mon esprit, tu as toujours été
présent. L’amour c’était Toi. Le bonheur aussi. Pour moi, tu fus ce « Tout »
qui m’a comblée, même si… Je ne me suis jamais arrêté à des « si », tu valais
bien plus que ça ! Oui, tu méritais tout mon amour, et cette flamme que
j’ai toujours eue pour toi continuera d’éclairer ta vie quand je ne serai plus
là… ».
PS : Si tu lis ce livre en ce moment même, c’est que mon
corps est loin d’ici, mais je t’ai laissé mon âme. Imprègne-toi d’elle comme je
me suis imprégné de la tienne. N’oublie jamais combien je t’ai aimé et
continuerai de le faire de là où je serai.
Signé : Celle qui n’a jamais cessé de croire et d'avoir foi
en toi.
Les larmes l'empêchèrent de continuer, mais il ne pouvait
pas détacher ses yeux du bien qui était entre ses mains…
- Elle et ses
secrets !
Il referma le livre pour regarder la photo de couverture
qu’il caressa de ses doigts, tendrement. C’était une des photos d’elle et de
lui, prise pendant le voyage qu’ils avaient fait ensemble en Tunisie. Un
sentiment intense le traversa si fort en se rappelant cette époque où ils furent
heureux qu’il en eût eu la chair de poule.
Plus tard, une fois rentré à l’intérieur, il prit place dans
un fauteuil du salon. Ses jambes et ses mains tremblaient de plus belle. Il
ignorait encore que lorsqu’il refermerait le livre, une fois après l’avoir lu,
les mots d’Ambre bouleverseraient sa vie. Alors avant le coucher du soleil et
sous l’œil protecteur de son ange, il débuta sa lecture.
En Mémoire de Nous...
Chapitre VI
« En mémoire de
nous »
Elle voulait raconter son histoire au reste du monde
simplement pour qu'il ait la définition exacte de l'amour, de la passion, de
l'addiction. Elle voulait retracer votre début, chaque infime journée qui a
fait de vous un couple. Chaque minute, chaque seconde... Ce début si maladroit,
ce milieu si passionnel, cette fin si douloureuse... votre fin.
Fin Septembre 1984 : tout commença 24 ans plus
tôt.
Assise seule à une table d’un café dans Paris, ville de
rêverie, une jeune femme brune, du nom d’Ambre Ben Yedder, la vingtaine aux
cheveux long, noir et bouclés, lisait avec avidité « Laila et ses confidences
». Elle en connaissait déjà l'histoire, ayant oublié seulement les détails, pour
l'avoir déjà lu plusieurs fois. Mais elle avait trouvé dans la lecture un
refuge contre les pensées maussades qui avaient tendance à l'assaillir ces
derniers temps. Perdue dans les lignes, soudain, elle entendit une voix
masculine dire derrière elle :
- Je t’observe depuis plus d’un quart d’heure et … commença
t-il puis il se tut.
- Et ? demanda-t-elle intriguée en se retournant.
- Je voulais juste te dire que tu es merveilleusement belle
quand tu rêves…
Elle s’étonna de son audace ! Un homme se tenait debout
devant elle, l’air décontracté, il portait un blue-jean, un tee-shirt noir et
tenait un journal dans sa main droite. Ses lunettes noires l’empêchèrent de
voir la couleur de ses yeux. Il était beau, attirant, intrigant… Cela la
perturba et son cœur s’emballa.
- Un autre café ? demanda-t-il avec un sourire
charmeur.
Elle se mit à son tour à sourire intérieurement. Elle
l’observa, le dévisagea. Essayant de calmer son esprit en prenant un ton plus
arrogant pour répondre à son invitation.
- Non, merci ! répondit-elle, en essayant de paraître le
plus ferme possible.
Elle baissa instinctivement la tête.
- Tu es sûre de ne rien vouloir boire ? réitéra-t-il, d’une
voix insistante devant son refus. Même pas un verre d’eau ?
Elle releva la tête et vit son regard insistant :
- Merci !
Elle prit le verre d’eau qu’il lui tendit. Sa main toucha la
sienne. Retenant sa respiration le temps que dura le frôlement pendant lequel
ses doigts avaient langoureusement parcouru sa main. Il le fit exprès, ce fut
une évidence ! Il comprit qu’elle fut gênée par sa démarche, alors il s’approcha
plus près d’elle, et d’une de ses mains, il lui releva son menton, la regardant
droit dans les yeux :
- Que fais une jolie femme telle que toi seule dans un café ? lança-t-il en jetant un regard circulaire autour de lui.
- J'aime la solitude ...
Il sourit, tandis qu’elle le regarda, incrédule, s'asseoir à ses côtés.
- Je vous en prie, installez-vous, siffla-t-elle avec ironie sans cacher son ressenti.
Il ne lui prêta guerre attention, posa son journal d’un air amusé contrastant avec l'indignation qui teinta le visage d’Ambre, et ce fut pour lui poser une nouvelle question.
- Tu es froide avec moi seulement ou ?
- Par principe, lâcha-t-elle sans réfléchir. Vous accostez les gens sans pudeur, sans gènes, et vous ne paraissez même pas vous rendre compte que je ne suis pas impressionnée par votre manque de tact. Et une dernière chose, je pense qu’il est temps pour vous de passer votre chemin !
- C'est tout ?
- Non, répondit-elle exaspérée. Vouloir me parler n'est pas l'idée la plus brillante que vous ayez eu !
- Tu crois qu'en jouant la fille blasée, tu vas me faire fuir ?
- Je ne ... Quoi ? Blasée, moi ?
- Oui, blasée. Ce n'est pas parce que ta vie sentimentale doit être un fiasco que tu vas détruire celle de tous les types que tu croises.
Estomaquée, elle le dévisagea, ne sachant quoi répliquer.
- C'est une blague ? Vous êtes vraiment en train de me juger, alors que l'on ne s'est jamais adressé la parole ? C'est quoi ce plan ?
Elle sentit la colère monter en elle, telle une marée dont elle tenta de contenir les flots. Lui, ne sembla pas se rendre compte de sa rage naissante, ou alors il feinta de l'ignorer avec une habileté remarquable.
- On s'est parlé, il y a deux semaines tu t’en souviens ? Tu étais presque aussi chaleureuse qu'aujourd'hui, poursuivit-il avec ironie devant mon mutisme, c'est sans doute pour cela que tu l'as oublié. A moins que tu ais préféré jeter ce souvenir à la trappe parce que tu avais abandonnée pendant un instant ta fierté ?
Masquant tout accès de colère, elle rangea son livre dans son sac, froissant au passage une feuille volante qu’elle n'avait pas pris le temps de ranger, et enfila son manteau.
- Je suis désolé, je ne voulais pas dire quoi que ce soit qui puisse te blesser.
Elle aurait voulu le tuer sur place.
- Alors abstiens-toi de jouer au mec compréhensif. Ce n'est pas parce qu'on s’est croisé quelque part que je dois m’en souvenir et je n’aime pas qu’on vienne m'emmerder.
- Que fais une jolie femme telle que toi seule dans un café ? lança-t-il en jetant un regard circulaire autour de lui.
- J'aime la solitude ...
Il sourit, tandis qu’elle le regarda, incrédule, s'asseoir à ses côtés.
- Je vous en prie, installez-vous, siffla-t-elle avec ironie sans cacher son ressenti.
Il ne lui prêta guerre attention, posa son journal d’un air amusé contrastant avec l'indignation qui teinta le visage d’Ambre, et ce fut pour lui poser une nouvelle question.
- Tu es froide avec moi seulement ou ?
- Par principe, lâcha-t-elle sans réfléchir. Vous accostez les gens sans pudeur, sans gènes, et vous ne paraissez même pas vous rendre compte que je ne suis pas impressionnée par votre manque de tact. Et une dernière chose, je pense qu’il est temps pour vous de passer votre chemin !
- C'est tout ?
- Non, répondit-elle exaspérée. Vouloir me parler n'est pas l'idée la plus brillante que vous ayez eu !
- Tu crois qu'en jouant la fille blasée, tu vas me faire fuir ?
- Je ne ... Quoi ? Blasée, moi ?
- Oui, blasée. Ce n'est pas parce que ta vie sentimentale doit être un fiasco que tu vas détruire celle de tous les types que tu croises.
Estomaquée, elle le dévisagea, ne sachant quoi répliquer.
- C'est une blague ? Vous êtes vraiment en train de me juger, alors que l'on ne s'est jamais adressé la parole ? C'est quoi ce plan ?
Elle sentit la colère monter en elle, telle une marée dont elle tenta de contenir les flots. Lui, ne sembla pas se rendre compte de sa rage naissante, ou alors il feinta de l'ignorer avec une habileté remarquable.
- On s'est parlé, il y a deux semaines tu t’en souviens ? Tu étais presque aussi chaleureuse qu'aujourd'hui, poursuivit-il avec ironie devant mon mutisme, c'est sans doute pour cela que tu l'as oublié. A moins que tu ais préféré jeter ce souvenir à la trappe parce que tu avais abandonnée pendant un instant ta fierté ?
Masquant tout accès de colère, elle rangea son livre dans son sac, froissant au passage une feuille volante qu’elle n'avait pas pris le temps de ranger, et enfila son manteau.
- Je suis désolé, je ne voulais pas dire quoi que ce soit qui puisse te blesser.
Elle aurait voulu le tuer sur place.
- Alors abstiens-toi de jouer au mec compréhensif. Ce n'est pas parce qu'on s’est croisé quelque part que je dois m’en souvenir et je n’aime pas qu’on vienne m'emmerder.
Sans lui jeter le moindre regard, elle quitta le café après
avoir laissé quelques pièces sur la table.
Prenant le chemin de l’appartement de Martine. Elle tenta
vainement de garder son calme, essayant d'oublier les quelques mots que cet
inconnu venait de lui balancer. Elle n'avait pas l'habitude qu'une autre
personne que sa meilleure amie lui crache des telles vérités en pleine face.
Mais lui, il lui inspirait une telle colère. Sous ses airs de mec un peu paumé,
il avait une façon d'observer les autres à leur insu, et elle en avait fait les
frais. Ou du moins c'est ce qu’elle pensa, au vu du peu qu'il avait deviné de
sa vie à l'issus de leurs quelques paroles échangées. Au fond il devait penser
que son action était louable. Avec quelqu'un d'autre peut-être, mais elle avait
un profond mépris envers toute forme d'attendrissement.
Elle courut presque à présent. Une pluie bruineuse donnait
du ressort à ses ondulations, et elle passa sa hargne en observant avec un
malin plaisir les filles qui se pressaient sous leur parapluie pour masquer
leur brushing impeccable.
Cette rencontre avait pendant des jours et des nuits troublé sa vie. Elle le voyait sans cesse son visage. Ne cessant de penser à cet inconnu arrogant, certes et, aussi stupide que cela puisse paraître, ce n’était plus un étranger pour elle mais bel et bien un homme avec lequel elle s’endormait et se levait tant il la hantait. Puis les mois s'étaient écoulés, elle passait ses journées à écrire : il fallait qu’elle avance. Son seul but étant de pouvoir réaliser ce rêve qui lui tenait tant à cœur.
Cette rencontre avait pendant des jours et des nuits troublé sa vie. Elle le voyait sans cesse son visage. Ne cessant de penser à cet inconnu arrogant, certes et, aussi stupide que cela puisse paraître, ce n’était plus un étranger pour elle mais bel et bien un homme avec lequel elle s’endormait et se levait tant il la hantait. Puis les mois s'étaient écoulés, elle passait ses journées à écrire : il fallait qu’elle avance. Son seul but étant de pouvoir réaliser ce rêve qui lui tenait tant à cœur.
Mouna Toujani
Roman " En mémoire de nous "
Ambre, était de celle qui ne croyait en rien avant de le
rencontrer. Elle avait amortie trop de coups pour croire en quoi que ce soit.
Et surtout pas en l’amour. Elle ne croyait en rien, simplement pour ne rien
attendre des autres et de la vie.
Jusqu'à lui…
A présent, elle se retrouvait seule dans cet appartement, cet
appartement qu’elle ne voulait pas quitter. Contemplant les photos qu’il avait
prises d’elle, les placards vides jadis remplis de lui… Elle contempla ce
« eux » qui n’en était plus un…. Elle contemplait ce qu’il avait fait
d’elle, ce qu’il avait fait d’eux.
C’est fou comme elle aimait cet appartement, c’est fou comme
elle l’y avait aimé dedans, c’est fou à quel point elle l’avait aimé et à quel
point elle l’aimait sûrement encore…
Combien de temps ? Combien de journées s’étaient écoulées depuis ce jour là ? Combien de jours sans lui ? Combien de jours à vivre... Atrocement, trop douloureusement, trop mal, trop simplement ? Combien de minutes, de secondes sans son corps, sans son rire, sans son cœur, sans la raison pour laquelle elle avait commencé à aimer la vie ?
Il s’insinuait dans son esprit, prenant possession de sa
raison, il anéantissait l'espoir, l'envie, la volonté... Cherchant cette partie
de lui, qu’elle attendait, qu’elle
voulait bien plus férocement qu'aucune autre... Pourtant, elle n’aurait jamais
cru pouvoir parler de lui au passé, n'évoquer que les souvenirs et non le
présent... Pourtant, elle ne savait pas leur fin si proche, elle ne savait pas
qu'il y aurait une, tout simplement.
Elle doutait du présent et de cet avenir si flou. Elle avait peur pour elle et peur des choses qu’elle pourrait faire... Peur de l'amour qu’elle avait pour lui et de la folie que ça faisait naître en elle... Peur de se perdre, de ne plus se reconnaître, de ne pouvoir exister qu'avec lui... Peur de ne pas être assez forte, de ne pas pouvoir vivre une minute de plus sans lui.
Elle doutait du présent et de cet avenir si flou. Elle avait peur pour elle et peur des choses qu’elle pourrait faire... Peur de l'amour qu’elle avait pour lui et de la folie que ça faisait naître en elle... Peur de se perdre, de ne plus se reconnaître, de ne pouvoir exister qu'avec lui... Peur de ne pas être assez forte, de ne pas pouvoir vivre une minute de plus sans lui.
Elle doutait de ne pas être assez solide pour encaisser la
douleur, les coups durs… Elle avait peur de devoir tirer trop tôt le rideau. Peur
de devoir renoncer à lui, trop tôt, trop vite, trop mal... Peur de devoir tirer
un trait sur eux par obligation, pour sa survie...
Et brusquement, sans trop y réfléchir, elle se leva, enfila
un jeans, ses chaussures, fonça et courut prendre un taxi… En direction du lieu
où ils s’étaient rencontrés la première fois… Arrivée, elle paya le chauffeur,
descendit… Traversa la rue, avança jusqu'à ce bar, fit marche arrière, esquissa
un pas puis deux... Une larme se mêla à la situation devenue presque grotesque.
Elle courut jusqu'au carrefour d'une rue, marcha la nuit, seule, tentant de
retrouver le chemin de chez elle en regrettant cette folle envie de le revoir,
voulut tant de fois faire demi-tour, revenir sur ses pas et le retrouver. Elle marcha
la nuit, une heure, peut-être même deux jusqu’à arriver à destination... Le
cœur ayant pris le pas sur la raison.
Elle l'imagina là, patientant, presque hésitant. Elle
l'imagina tout comme elle espérait l'apercevoir dans un coin, dans l'obscurité,
sentir son odeur et se laisser guider par elle. Elle attendit qu’il daigne lui montrer
que tout était réciproque, qu’il avait enfin compris que l'amour n'était pas
qu'une arme de destruction, qu'à deux ils pourraient devenir un tout, quelque
chose de bien plus fort, de bien plus beau.
Elle attendit comme on attend l'amour sur un quai de gare, au carrefour d'une rue. Elle attendit comme on attend qu'une fois ; espérant qu'un dieu, auquel on ne croit pas, nous fasse un signe. Un seul et unique. Elle attendit... Et puis croyant faire le bon choix, celui qui lui épargnerait quelques souffrances de plus, elle lui téléphona. Tuant cet autre « moi » l'intimant de rester et d’attendre. Il se donnèrent rendez-vous à la maison, leur chez eux, leur nid d’amour…
Elle courut, à en perdre haleine, dévalant les escaliers sans aucune conscience du risque, de la connerie qu’elle était entrain de faire, de la peur de rechuter. Elle courut... Rattrapant à la volée cette foutue fierté qui avait décidée de se faire la malle. Elle courut vers lui... Inconsciemment. Peut-être bien trop consciemment. Elle ne savait pas pourquoi... Mais, elle courut vers lui.
Elle se souvint de ces dernières marches, de cette porte qu’elle avait poussée le cœur lourd, les mains moites, les yeux larmoyants... Elle se souvint des quelques pas qu’elle avait esquissés dans la nuit et de ça... Oui de ça. D'une main lui agrippant le bras... Des battements de son cœur s'accélérant en une danse folle. De ça... Du bonheur, de la peur, de cette peur divinement bonne... D'une main possédant son avant-bras, tendrement... D'une autre se faisant amante de ses hanches, de ce baiser brisant un de ces silences qui ne s'oublie pas.
Alors, elle avait dit oui à tout... Tout ou rien mais avec lui. Au changement, à la peur. Oui à ce qu’elle ne connaissait pas. Oui à l'amour. Oui à cette nouvelle vie qui s'offrait à elle. Oui à ce qu’elle n’était pas. Oui à ce qu’elle aimerait être. Oui à l'inconnu.
Elle se souvint... De son corps contre le sien, de sa bouche à la commissure de ses lèvres. De la chaleur au creux de son ventre, de cette étreinte et de toutes les autres qui ont suivi... De son rire. De ces quelques minutes de silence qu’il avait fini par briser.
Elle attendit comme on attend l'amour sur un quai de gare, au carrefour d'une rue. Elle attendit comme on attend qu'une fois ; espérant qu'un dieu, auquel on ne croit pas, nous fasse un signe. Un seul et unique. Elle attendit... Et puis croyant faire le bon choix, celui qui lui épargnerait quelques souffrances de plus, elle lui téléphona. Tuant cet autre « moi » l'intimant de rester et d’attendre. Il se donnèrent rendez-vous à la maison, leur chez eux, leur nid d’amour…
Elle courut, à en perdre haleine, dévalant les escaliers sans aucune conscience du risque, de la connerie qu’elle était entrain de faire, de la peur de rechuter. Elle courut... Rattrapant à la volée cette foutue fierté qui avait décidée de se faire la malle. Elle courut vers lui... Inconsciemment. Peut-être bien trop consciemment. Elle ne savait pas pourquoi... Mais, elle courut vers lui.
Elle se souvint de ces dernières marches, de cette porte qu’elle avait poussée le cœur lourd, les mains moites, les yeux larmoyants... Elle se souvint des quelques pas qu’elle avait esquissés dans la nuit et de ça... Oui de ça. D'une main lui agrippant le bras... Des battements de son cœur s'accélérant en une danse folle. De ça... Du bonheur, de la peur, de cette peur divinement bonne... D'une main possédant son avant-bras, tendrement... D'une autre se faisant amante de ses hanches, de ce baiser brisant un de ces silences qui ne s'oublie pas.
Alors, elle avait dit oui à tout... Tout ou rien mais avec lui. Au changement, à la peur. Oui à ce qu’elle ne connaissait pas. Oui à l'amour. Oui à cette nouvelle vie qui s'offrait à elle. Oui à ce qu’elle n’était pas. Oui à ce qu’elle aimerait être. Oui à l'inconnu.
Elle se souvint... De son corps contre le sien, de sa bouche à la commissure de ses lèvres. De la chaleur au creux de son ventre, de cette étreinte et de toutes les autres qui ont suivi... De son rire. De ces quelques minutes de silence qu’il avait fini par briser.
Mouna Toujani
Le coeur serré
Ambre ne voulait pas le forcer,
elle avait préféré attendre qu’il soit prêt !
Elle avait fait une grave erreur, elle aurait du tout lui
avouer, ce n’est qu’après les dégâts que peuvent causer les secrets qu’on se rend
compte qu’en un rien de temps, tout peut chavirer…
Les promesses s’étaient envolées, les « je
t'aime » étaient devenus superflus, les marques d'affection des choses
calculées, forcées... Ils avaient fini par se détester à s'en faire mal, à se
détruire... Tout s'était effrité sous leurs yeux, surpris de voir que la
difficulté pouvait les frapper, de voir qu’ils n’étaient à l'abri de rien...
Ils avaient fini par faire l'amour parce qu’il aimait ça, parce qu’il en avait
besoin ; ils avaient fini par jouer un double jeu, les silences à deux... Ils
avaient fini par être une pâle copie de ce qu’ils redoutaient, et même avec une
vie aussi remplie que celle de Robert, qui était devenue celle d’Ambre, la routine
s'était installée... Et ils avaient sombré.
Ils auraient pu rester des années comme ça, à se mentir, à
ne pas regarder la réalité en face et se bercer d'illusions ; elle pensait
qu’ils auraient pu tenir toute une vie comme ça... Parce que malgré tout, ils
s’aimaient, et avaient ce besoin constant l'un de l'autre... Ils s’aimaient
bien plus encore sûrement, que la situation
dans laquelle ils étaient.
Et un soir, elle le vit
s’approcher du lit, et fit semblant de dormir. Elle ressentait que ce
qu’il avait à lui dire était très
important, et qu’un problème l’étouffait. Elle pouvait le ressentir.
Inconsciemment, elle savait qu’elle le perdait, mais elle ne voulait en aucun
cas l’entendre le lui dire.
Il n’avait pas dormi de la
nuit ainsi que Ambre ! Elle l’entendit pleurer et elle n’avait pas la force de bouger,
ses sanglots résonnaient dans sa tête ! Un appel, une prière pour qu’elle
réagisse et qu’elle l’aide à se délivrer du poids qui le rongeait. Ambre,
anéantie, s’en voulait de ne pas avoir eu ce courage : celui de le retenir…
Car c’est bien ce qu’elle avait redouté, qu’un jour il lui dise qu’il fallait
qu’il s’éloigne d’elle. Au fond, elle l’avait toujours su que cet instant
arriverait… Mais elle avait toujours aussi su qu’il lui dirait qu’il
reviendrait… Et ça, elle ne pouvait l’accepter… Chacun d’eux portait un secret
en lui, ils n’avaient pas su en parler, la peur de se faire du mal, la crainte
de devoir affronter le regard de l’autre, d’assumer ces choix… Et pourtant, ça
les concernait tous les deux et leur vie commune.
Au levé du soleil, elle
l’entendit préparer sa valise… Il s’attarda un peu dans la cuisine. Inquiète,
elle se leva. Robert était assit tenant dans sa main une lettre qu’il referma.
Et elle comprit que les mots écrits de la main de l’homme qu’elle aimait la
plongeraient dans une tristesse à en mourir… Car ils ne pouvaient contenir que
les vérités qu’elle se refusait d’admettre ! Elle retourna sans faire de bruit
dans son lit. Recroquevillée, pleurant toutes les larmes que jusqu’à présent
elle avait péniblement eu du mal à contenir.
Silencieusement, son ombre passa
le pas de la porte...
Ce soir là, fut le dernier...
Elle s’entendit encore
intérieurement crier, hurler, le suppliant de revenir… Mais pas un son n’avait
pu sortir… Tous les mots étaient resté en elle. La lettre resta quelques heures
sur la table de la cuisine où il l’avait déposée sans qu’elle puisse y toucher.
La prenant dans ses mains tremblotantes, ses larmes avaient coulé, quelle ne fût
pas sa peine en constatant le contenu : des excuses sans
explications ! Juste de banals « je suis désolé, mais je dois gérer une
autre partie de ma vie dont tu ne fais pas partie » et la phrase qui tue « je
te reviendrai dès que j’aurais tout réglé ». Elle l’avait haï, elle l’avait
maudit de l’aimer autant.
Et elle plongea dans la
plus noire des périodes de sa vie, l’enfer, le dégoût de tout, l’envie de se
foutre en l’air, pour elle tout s’était arrêté sauf ce besoin de le pleurer,
pleurer sa vie et cette horrible nuit où, aujourd’hui, elle le regrettait de ne
pas lui avoir tout dit.
Ambre ne dormait plus, ne
mangeait plus, ne vivait plus ! Restant des heures dans le noir où, dans ces
moments, il lui revenait en mémoire, en ayant ce mal de chien, ce mal qui est
en nous et, quoi que l’on fasse, ne passe pas, ne guérit pas, ne s’oublie pas.
Ces larmes versées dès qu’il venait dans ses pensées, ce besoin de lui,
d’entendre sa voix, ces bruits de pas entendus en espérant à chaque fois que
c’étaient les siens.
Ils auraient dû parler… Elle se souvint de ce
jour où les non-dits auraient du éclater, les reproches les gifler... De ce
jour, où aucun mot n'avait pu embrassé leur bouche, où aucune larme n'avait
lacéré leurs joues... De ce jour, où le silence avait pris possession d’eux…
Elle se souvint de ce jour où la fin avait sonné… De ce moment qu’elle avait
tant redouté, de ce fichu jour où il était parti sans se retourner... Elle s’en
souvint, comme si c'était hier...
Elle se souvint bien plus encore de sa haine à la vue de ces
quelques mots. De voir qu’il n'avait en aucun cas pris la peine de l'appeler
après plusieurs semaines de silence, du peu de respect qu’il lui portait. Elle
l’avait haï, de la traiter de la sorte...
Elle se détesta ce jour-là, elle se détesta pour tous ces espoirs qu’il
avait formulés, pour ces sentiments si mal contrôlés, pour son côté naïf
qu’elle avait, auparavant, réussi à maîtriser. Elle se détesta de l'aimer,
alors qu’elle avait conclu un pacte avec son cœur et sa raison. Elle se détesta
d'avoir perdu, d'avoir été si faible. Et ce jour-là, à cet instant précis, elle
s’en voulu de l'avoir rencontré.
Elle n’avait pas vu les jours s’écoulaient, elle ne faisait
que réfléchir, essayant de peser le pour et le contre, de faire de la situation
quelque chose de comique, d'en rire, de n'en prendre que les bons côtés, de ne
plus penser à ce qu’elle pouvait bien ressentir. Elle essayait de croire
qu’elle pouvait lui résister ou mieux encore, que si elle décidait de le
rejoindre, il ne lui aurait été en aucun difficile de contrôler l'amour qui
avait pris possession d’elle. Qu’elle pouvait être plus forte, qu’elle valait
bien mieux que cela, et que sa fierté lui donnerait la force de lui sourire, de
taire ce qu’elle aurait désiré crier...
Elle eut tellement de regret, pour celui qu’il avait été
jadis, pour ce qu’il avait fait naître en elle. Pour ce sourire, cette beauté
presque aveuglante, pour ce corps et l'odeur qui s'en dégageait, pour ses mains
au creux de ses reins, pour sa bouche contre la sienne, pour cette domination
qu’il exerçait si bien sur elle. Cachant habilement l'amour derrière cette
haine qu’elle s’était confectionnée. Elle s’était époumonée à croire qu’elle
était bien plus forte que ce qui résidait en elle, qu’elle pouvait habilement
tuer ces sentiments, ces sensations. Elle se pensait bien plus forte, bien
moins amoureuse.
Mouna Toujani
En Mémoire de Nous...
A lire avec cette musique :
Ce mois fut une sorte de défi
pour Ambre, comprendre la grandeur de son amour, s'habituer à des sensations inconnues
jusqu'alors, idolâtrant les larmes, le manque. Apprécier l'envie, la passion...
Chérir ces flashs, ces moments de perte de contrôle. C'était une sorte de test,
pour voir si, ce qu’elle ressentait n'était que passager ou bel et bien ancré
en elle, pour voir si tout cela était indélébile ou si tout pouvait se déloger
de son cœur, lentement, avec le temps...
Elle ne ressentait plus rien, à part ses cris silencieux de
désespoir... Et à chaque fois qu’elle franchissait le pas de la porte, en
rentrant dans cet appartement encore imprégné de Robert, elle prenait conscience
de tout ce qui venait de se produire, elle quittait le monde parallèle dans
lequel elle était pour se retrouver dans la réalité, le vide, le rien... Le
silence n'était plus d'or, elle entendait son cœur battre à tout rompre, elle
ne sentait plus ses jambes, qui flageolaient. La respiration saccadée, les yeux
embués... Son corps, son esprit, son cœur si lourd de tristesse. Elle avait mal
à en mourir... Mal d'avoir perdu le Robert qu’elle aimait… Comment ont-ils pu
en arriver là ? Un jour il lui faisait l'amour, l'autre il s’en va...
Comment ? Pour quelles raisons, quelles sont les causes ? Ou avait-elle fauté ?
se demanda-t-elle sans cesse.
Savait-il seulement ce qu’elle ressentait ? Avait-il la
moindre idée de ce qui se tramait au fond d’elle ? De ce qui se cachait ou
laisser dévoiler, de ce qui l'étouffait, de ce qui la rongeait ou bien encore
de ce qui la brûlait au point de vouloir hurler ? Savait-il ce que c'était
d'aimer aussi férocement, de se persuader que ce n'était rien, que tout pouvait
s'évanouir aussi facilement que s'était apparu, de finir par apprivoiser la
tristesse, commençant à l'aimer elle aussi. Savait-il à quel point elle l’avait
aimé ? Et à quel point tout cela était si difficile...
Lorsque son nom effleurait ses lèvres ou encore son esprit,
lorsqu’elle ne contrôlait plus rien et qu’il lui apparaissait distinctement ?
Ce combat incessant que ses sentiments l'obligeaient à entreprendre, la peur de
ne plus jamais se reconnaître, de finir par s'habituer à la perte, au manque et
désirer que tout cela ne cesse jamais.
Elle aimait la douleur autant qu’elle avait aimé sa bouche, elle
aimait la tristesse avec autant de passion que ses mains sur son corps, le manque
tout aussi tendrement que ses mots au creux de son oreille, les larmes aussi
délicieusement que son odeur. Elle aimait tout ce qui lui rappelait Robert, oubliant
à quel point tout ça lui était insupportable. Elle aimait souffrir, et voir
apparaître quelques plaies sur son cœur signe que cela persistait, signe que le
temps n'effaçait rien. Que l'amour pouvait prendre de l'ampleur au fil des
années, que le temps n'était pas synonyme d'oubli. Signe que son cœur battait encore,
et qu’elle était bel et bien en vie.
Elle aimait ce monde qu’elle s’était créé, elle aimait cette
tristesse qui prenait poussière, qui lui faisait faux bond parfois, qui
revenait avec force souvent ; qui la surprenait, la heurtait jusqu'à lui en couper
le souffle. Elle idolâtrait cette faculté qui lui était donnée de ne faire que
penser à lui, occulter tout ce qui l'entourait, de ne se concentrer que sur ce
qui lui rappelait douloureusement Robert, elle aimait lorsque son cœur se
serrait signe qu’elle souffrait, lorsque des larmes naissaient sans crier gare,
la stupeur de se savoir folle, l'étonnement de le voir aussi nettement chaque
jour.
Elle aimait l’aimer en silence. Avec une facilité
déconcertante. L'aimer comme elle le respirait, comme elle s'en alimentait...
Sans s'en apercevoir. L'aimer et s'étonner de l’aimer encore. Aimer le temps et
ce qu'il n'effaçait pas. Elle vouait un culte à tout ce qui la ramenait à lui,
tout autant qu’elle détestait tout ce qui lui rappelait douloureusement que le
temps ne faisait pas son œuvre laissant un arrière goût de fin.
Elle l’aimait comme on aime qu'une fois, se sachant incapable de ressentir à nouveau ce genre de sentiment qui l’épuisait, la maltraitait et la laissait lasse. Pourrait-elle aimer encore ? Simplement. Sans violence ni souffrance. Serait-elle encore capable de laisser son cœur s'ouvrir, montrer à un autre les séquelles d'une vie à ses côtés, d'une autre à l'aimer ? Pourrait-elle aimer sans chercher à souffrir ? Aurait-elle un jour envie que tout cela cesse et que, malgré cette fin, et qu’elle ne ressentait plus ce douloureux sentiment d'appartenir encore à quelqu'un ?
Est-ce que tout cela finira-t-il un jour ? Elle aimait l’aimer,
avec le temps, encore maintenant. Elle aimait ne pas savoir de quoi demain sera
fait, haïr ces moments de doutes autant qu’elle les chérissait lorsqu'ils la
ramenaient à lui.
Et le pire dans tout cela, ce n'était pas de le perdre, lui, ni de vivre sans Robert, ni même encore d'apprivoiser une douleur à la hauteur de son amour, non, ce n'était pas ça... Le pire dans tout cela, c'était de ne plus se reconnaître. Elle aurait pu se contenter d'apprécier le fait qu'avec elle, il ait pris conscience de la vie, de l'importance de l'amour et bien plus de la valeur des femmes, elle aurait pu se satisfaire du simple fait que pour elle, il ait changé et que malgré les années, malgré la fin, le commencement d'autre chose, il serait resté le même, en hommage à leur amour et peut-être, prétentieusement sûrement, en hommage à elle. Elle aurait pu se contenter de ça, d'avoir été un des piliers marquants de sa vie, mais à présent... Tout s'était effacé, s’était transformé, et tout ne devint que poussière...
Il ne restait plus rien…
Elle aurait sûrement accepté de tout perdre, de s'abandonner
dans les tréfonds d'une vie aucunement faite pour elle, reléguer au second plan
celle qu’elle était, sa carrière, certaines envies. Elle aurait sûrement pu
tout accepter, laisser tout de côté pour que leur couple tienne, pour que rien
ne s'effondre sous le poids du silence, du mensonge, de la gêne, de l'amour.
Consolider ce qu’ils étaient, ne s'astreindre qu'à cela, solidifier leur
couple, tenir bon pour deux, y croire jusqu'à s'oublier soi-même. Ne vivre que
pour eux, simplement et uniquement pour eux. Devenir la force incarnée, se
battre à en perdre son souffle, à en mourir d'épuisement. Elle aurait sûrement
pu accepter de n'être que la colle cicatrisant leurs cœurs meurtris, occulter
ce qu’elle était jusqu'à n’en plus connaître son prénom et la personne qui la
définissait. Elle aurait sûrement pu le faire indéfiniment, jusqu'à ce qu’il
brise de nouveau ce qu’elle avait mis un temps fou à solidifier, elle aurait pu tenir bon plus longtemps... Trop
longtemps.
Mouna Toujani
Roman " En mémoire de nous "
A lire avec cette musique:
13 Juillet 1990
Cher Robert,
Est-ce que tu as connu la sensation, cette sensation de ne pas
mériter tout ce que tu as autour de toi ? D'être dans un incessant combat entre
ton cœur et ton corps, de ne rien voir, comme si le monde semble tourner sans
toi. De n'être que le pantin de la vie. Inspirer, expirer inconsciemment.
Perdre peu à peu la notion des mots, des gestes. Vivre, survivre comme si tout
ne tenait qu'à un fil. Vivre aveuglement et indéniablement, ne pas mériter
cette vie qu'on nous offre. Oui, Bruno fait les choses bien... Pour qui ? Pour
quoi ? Pour moi ? Et si je ne méritais que l'indifférence ? Et si je n'étais
qu'un poids lui faisant courber l'échine ? Bruno (l’homme qui partage
actuellement ma vie) fait les choses bien, un peu trop sans doute.
M’en voudrais-tu si je te disais, que je remplacerai
volontiers l'amour par la haine, juste une seconde, pour voir l'effet que cela
procure, pour pouvoir être enfin en paix, voir les regrets s'effacer, les
souvenirs se détruire, pour me sentir plus légère. M'en voudrais-tu vraiment
Robert, si je te dis que j'aurais aimé te haïr et que chaque jour je m'efforce
de le faire ? Pour que cela devienne une habitude...
Tu aurais dû être avec moi aujourd'hui. Me soutenir, calmer
mon anxiété, être heureux, fier. Tu aurais dû être là Robert. Parce que tu
étais censé m'aimer au-delà de tout, au-delà des conventions, des différences,
des interdits. Au-delà de la souffrance, de la distance. Au-delà même de ce que
nous sommes. Parce que tu l'avais promis, parce que ça devait être que toi.
Uniquement toi. Parce que tu étais censé rester là Robert,
juste à côté de moi... Tu étais censé ne jamais me quitter. J'en ai la gerbe
Robert et je te déteste... Oui je te hais. Pour les promesses se réduisant en
cendres au fur et à mesure des années, pour la solitude, pour ton soi-disant
amour, pour ce jour où je t’ai laissé partir. Je te déteste pour m'avoir
obligée à vivre cette vie, incapable d'affronter ce que je suis et l'amour si
dévastateur qui est le tien. Je te déteste... Bien plus que je ne t'aime
Robert.
Tout ça est si pathétique. Tout ça m'écœure, m'offense,
m'essouffle, m'épuise. Je n'en plus de devoir être ce que je ne suis pas, de
devoir ranger tout ce qui me rappelle nous de peur d'être dévastée, de devoir
regarder devant moi faute de ne pouvoir parler du passé en souriant. Je n'en
peux plus Robert, de t'aimer à en mourir, de me croire capable du contraire, de
m'en persuader jusqu'à en devenir heureuse. Tout ça me donne la gerbe et
l'envie de baisser les bras se fait bien plus tentante. J'aimerais seulement
vivre, et pouvoir regarder Bruno droit dans les yeux et lui affirmer qu'il n'y
a plus que lui. Je ne peux plus supporter ce combat, ces souvenirs et tout ce
qui va avec... Tout ça est si pathétique Robert.
Mais je m’accrocherai à la deuxième vie que je mène, ce que
les autres appellent renaissance mais que je nommerais plutôt extinction, je
m'obligerai à vivre, aimer pour que les jours passent plus vite, pour que la
fin se fasse plus proche, plus rapidement, moins douloureusement.
Alors dorénavant, je jouerai un rôle pour cacher la gêne, le
manque, le cri de mon cœur qui se fait bien plus fort de jour en jour. Pour
cacher tout ce que j’ai été et que je n’aurais pas du être... Je tuerai les
doutes et tout ce qui compose la douleur qui m'assaille. Je jouerai le rôle de
ma vie, j'empêcherai les insultes de naître, l'envie de déguerpir de se
décupler, celle de tout détruire se retiendra derrière un sourire de façade,
parce que je dois le faire pour moi, pour lui.
Parce que c'est ce qui me permettra de ranger le livre de
notre vie et de le rendre ordinaire, qu'il devienne comme les autres avec le
temps, simplement rangé dans la bibliothèque de mes songes, n'ayant aucune
place significative de l'importance qu'il a eu lors de sa rédaction... Ce soir,
sera le soir que j'attends depuis près de quatre ans. Le soir où tu as écrit le
mot fin toujours par obligation, et je le ferai d'une encre indélébile, d'une
envie que rien ne pourra balayer... J’ai le droit Robert, d'espérer que ce soit
également la fin de tout ce que j'ai enduré...
Cela fait bien longtemps que je me suis résignée... Bien
longtemps que je t’ai laissé être le centre de mon monde, prendre entièrement
possession de moi. J'ai acceptée d'être faible face à toi, je me suis résolue à
te laisser parcourir chaque infime recoin de mon esprit, de mon corps et bien
plus encore de mon cœur. Je me suis résignée à ne plus être maître de mon
destin, à n'être guidée que par toi... Je me suis résolue à laisser derrière
moi l'ancienne Ambre... Et aussi dur que ça sera, j'apprendrai à vivre avec
cette autre moi que tu as fait naître... J'accepte Robert... Par
obligation, par abdication...
Un rayon de soleil, une averse, une rafale de vent, une
légère brise, une traînée blanchâtre... Peu importe le temps, peu importe le
lieu, le jour ou même encore l'heure... Peu importe la vie, le passé, le
présent ou même encore l'avenir, peu importe... Chaque jour est-le même,
perpétuellement, incessamment... J'apprendrai à vivre sans toi, à retenir mes
larmes, à en aimer un autre, à me laisser de nouveau approcher... J'apprendrai
à utiliser mon cœur de nouveau, à le laisser battre pour un autre, à ne plus
crier ton nom, à apprivoiser mes cauchemars, à aimer mes maux, ma souffrance,
ma tristesse... A apprécier la vie et ce qu'elle offre... Comme une veuve qui a
perdu l'homme de sa vie, j'apprendrai à vivre...
Tu sais Robert, il a mis du temps avant de faire partie de ma vie... Il m'a
laissée pleurer des jours entiers sans réellement comprendre, lui faire l'amour
avec domination sans aucune condition, il m'a laissée dans ma solitude certains
jours, m'a fait rire d'autres... Il a été là sans l'être vraiment... Attendant,
patientant, compatissant ! Il m'a aimée en silence... En ne demandant rien. Et
puis l'inévitable est arrivé, je t'ai reconnu en lui, j'ai entr'aperçu ton
ombre dans son regard, frôlé un corps qui me rappelait vaguement le tien, j'ai
fait abstraction de nos souvenirs pour laisser place à de nouveaux...
L'inévitable est arrivé, il s'est immiscé dans ma vie, lentement... Je l'ai
laissé m'aimer, me montrer que je n'étais pas une carapace d'os et de chair
sans vie, que je valais le coup... Il n'a rien promis, fait aucun projet... Il
me savait trop faible encore, pour me promettre toutes ces choses que tu as
dites... L'inévitable s'est produit Robert, il a habité ces lieux si vides de
toi... Simplement, sans brusqueries, je l'ai aimé...
Tu l'aurais adoré Robert, vraiment... Il est d'une drôlerie,
farceur, taquin; très professionnel, bien trop bosseur à mon goût, il a le vœu
de réussir et tente le tout pour le tout; il aime la musique, ces vieux tubes
que tu chéris aussi. Il est fier, un peu trop parfois tout comme toi, il aime
la vie et tout ce qu'elle lui apporte... Bien plus encore il m'aime... Comme
toi tu l'as fait à nos débuts ! Tu l'aurais adoré Robert... Car en tout point
semblable à toi ! T'aimer à travers lui me semble le remède parfait... Pourtant
tu disparais... De mes pensées, de mes rêves, de mes cauchemars, le trou béant
se referme... Il t'efface de ses je t'aime, de ses caresses, de ses baisers...
Il t'efface, avec mon consentement, lentement, sans effusion... Il t'efface,
notre passé avec...
Ambre
Après une centaine de mètre, elle revint sur ses pas. Ce besoin
violent et incontrôlable de savoir où il vivait et dans quelle circonstance.
Elle le vit monter sur sa moto. Ambre héla un taxi au même moment, et demanda
au chauffeur de le suivre. Trente minutes plus tard, il s’arrêta devant une
grande villa dans le Vésinet. Un enfant jouait dans leur grand jardin… Une
femme était allongée sur une chaise longue près d’une grande piscine. Un
chapeau cachait son visage, mais elle paraissait si belle, même vu de loin.
Elle vit son enfant
se précipiter en courant dans les bras de son père, sa femme à son tour se leva
pour les rejoindre, l’embrassant sur la joue… Ce fut à son bras que tous les
trois rentrèrent chez eux !
Une belle petite famille, non celle qu’elle s’était maintes fois
imaginée… À présent, elle pouvait mettre des images sur les personnages qui
avaient hanté sa vie. Elle resta encore un peu, regardant cette maison, perdant
la notion du temps, le ciel se couvrit, un orage éclata et il commençait à
pleuvoir à torrent…
Elle ressentit tellement de remords à l’égard de cette
femme, dont elle avait volé le mari que cette pensée même lui donna des
nausées. Elle sortit en courant de la voiture pour vomir sur le bas-côté, quand
une voix la fit sursauter !
- Vous allez bien Madame ? demanda le chauffeur.
Adossée à un poteau, toute mouillée par cette rafale de pluie,
elle releva la tête et, elle le vit et
il la vit. Il tenait le ballon de son fils dans ses mains. Probablement sorti
le chercher. Leurs regards se croisèrent et s’en disaient long… Elle le vit
venir vers elle, et elle se précipita vers le taxi, bien avant qu’il ne fût à
sa hauteur, Elle demanda au chauffeur de
vite démarrer.
Se retournant, elle le vit courir en criant son prénom, elle
caressa à son tour le pare-brise de ses doigts comme si elle caressait son
visage, puis sa silhouette avait disparue petit à petit.
Durant tout le trajet, elle s’effondra en larmes… Une partie
d’elle est morte ce soir-là. Elle était revenu au point de départ : il ne savait
rien pour leur fils mais elle, elle savait tout ce qu’elle devait savoir ! Et
elle sut, que plus rien ne serait plus comme avant ayant vu les conditions dans
lesquelles il vivait…
Et la vie a repris son cours.
Ambre avait le coeur plein de regrets, d'amertume et
d'incompréhension. Le cœur lourd d'envie de lui crier qu’elle n’avait fait que
ce qu'il était de son devoir de faire, qu’elle n’avait agi ainsi que pour se
préserver... Elle aurait aimé avoir raison, et qu'il n'y avait plus que cela à
faire. Qu’elle n’avait fait que combattre, pour s’obliger à n'être que chimère
pour qu’ils arrêtent de détruire le passé avec un présent bien trop laid, bien
trop immonde.
Les images, les sensations, les larmes, les sourires forcés,
l'incapacité de revenir en arrière auraient dû disparaître... Son cœur, et bien
plus encore son esprit, avaient pour devoir de s’habituer maintenant. Elle
n’aurait pas du avoir à affronter ça, ce jour et ce qui en avait découlé, elle
ne devait pas avoir à y repenser sans cesse lorsque les souvenirs d'un passé
heureux venaient l'enlacer. Il n’aurait du rester que le bon, la fin de quelque
chose qui fût merveilleux, ce jour-là aurait dû disparaître avec les mauvais
jours, les larmes, les pleurs, cette gifle, la tromperie et bien plus encore
avec ce Robert qu’elle ne reconnaissait pas, cette Ambre qu’il l’avait obligée
à être.
Tout aurait dû disparaître, mais il persistait, son souvenir
persistait, voulant à tout prix être le plus fort, prendre de la place jusqu'à
faire suffoquer les démons qui s'emparaient d’elle, chaque infime seconde de
chaque jour. De ce corps et de chaque infime courbe qui le définissait. De la
douleur assaillant son cœur à son contact.
Parce que les sentiments étaient là, encore et toujours,
logeant entre la haine et le désespoir. Oui les sentiments étaient là, cachés,
patientant tant bien que mal. Parce que ce fut trop tôt, bien trop tôt... Ca
n’aurait pas du se passer ainsi…
Mouna Toujani
Regrets silencieux
A lire avec cette musique:
Hier soir, elle s’était vu tout détruire, elle s’était vu
devenir une autre personne, la haine était si grande, son emprise si
enivrante... Hier soir, elle crut que son monde s'effondrait, que tout allait
disparaître, elle avec... Hier soir, elle avait perdu confiance, l'envie, la
force... Elle avait perdu tout ce qui la définissait... En une fraction de
seconde, en à peine une fraction de seconde, elle s’était perdue...
Pourtant...
Assise sur la terrasse, tentant de ne pas réfléchir, se
laissant enivrer par la fraîcheur de l'air, appréciant la nicotine qui faisait
corps avec elle... Ambre reprenait son souffle, apprivoisait son anxiété qui
faisait de sa tristesse une amie...
La ville était endormie, à défaut de ce corps sans vie, de
cet esprit alerte... La ville était endormie, à défaut d’elle qui ne trouve une
fois de plus pas le sommeil... Soudain, le bruit du téléphone se fit entendre.
C’était Martine :
- Allo ?
- Ambre? C'est moi...
- Ambre? C'est moi...
Elles n’avaient pas besoin de long discours, ni de grandes
phrases toutes aussi barbantes les unes que les autres... A contrario de
communiquer par le regard, le silence était de mise. Et Dieu sait qu’Ambre
aimait ces silences, ces silences si éloquents, si précieux, si dévastateurs, si
puissants... La ville est endormie à défaut d’Ambre, mais bien plus encore à
défaut de Martine...
- Que j’aime entendre cette voix.
- Je n’arrivais pas à trouver le sommeil, chuchota Martine.
Je m’inquiète tellement pour toi…
- Je ne dormais pas non plus…
Elle était le seul lien qui les unissait encore, la seule
qui avait su rester dans sa vie, celle qui lui parlait de Robert, celle qui comblait
les silences quand elle ne trouvait plus rien à dire, qui la rattachait à la
vie, qui prenait le soin d'effacer les mensonges, de crier la vérité sans prononcer
son nom, sans rentrer dans les détails... Elle avait été celle qui lui avait
annoncée les coups durs qu’elle devait affronter. Elle était le rocher sur
lequel elle se reposait lors de terribles tempêtes...
- Ambre, tu es toujours la ?
- Oui.
- Je passerai vous voir bientôt.
- Oui.
- Je passerai vous voir bientôt.
- Je t’aime.
- Moi aussi, Ambre… moi aussi, souffla-t-elle avant de
raccrocher.
Cette nuit là, Ambre se demandait si Robert connaissait ce
vœu immuable, ce vœu bien trop puissant, ce cri aigu d'une envie, cette
sensation bien trop dévorante au creux de son échine ? Connaissait-il ce vœu de
revivre ces moments d'extase, de transe, ces moments qu’on chérit d'une telle
force, ces moments où la joie parcourait si violemment nôtre corps tout
entier... Connaissait-il.. Ce désir de revenir en arrière, de stopper la course
effrénée d'un présent pour replonger dans un passé. Connaissait-il, cette envie
que rien ne peut combler ? Ambre la connaissait bien trop, elle connaissait
bien trop cette force qui nous propulse dans les plus infimes recoins de nôtre
esprit, à la recherche d'un souvenir, d'un bout de quelque chose qui fut jadis
une réalité... Elle connaissait bien trop ça... Bien trop fort…
C'est fou comme l'air lui paraissait différent, comme les gens lui paraissaient sans vie... C'est fou comme, elle se sentait troublée, frêle, tremblotante... Ce n'était que la fin de quelque chose, l'acceptation de la fin de ce quelque chose qu’elle n'osait prononcer, ce n'était qu'une rencontre parmi tant d'autres, ce n'était qu'une vie... Sans lui, avec lui, près de lui, loin de lui...
C'est fou comme l'air lui paraissait différent, comme les gens lui paraissaient sans vie... C'est fou comme, elle se sentait troublée, frêle, tremblotante... Ce n'était que la fin de quelque chose, l'acceptation de la fin de ce quelque chose qu’elle n'osait prononcer, ce n'était qu'une rencontre parmi tant d'autres, ce n'était qu'une vie... Sans lui, avec lui, près de lui, loin de lui...
Mouna Toujani
Mouna Toujani
Extrait de mon Roman " En mémoire de nous "
A lire avec cette musique :
Les étoiles brillaient dans le ciel sombre. Ambre essaya de
trouver le sommeil, mais en vain. A ses côtés Bruno dormait paisiblement.
Craignant de le réveiller par ses maintes agitations, elle décida de quitter le
lit. Posa ses lèvres quelques secondes sur son épaule nue, lui caressant les
cheveux, puis elle enfila un court peignoir blanc qui traînait à ses pieds.
Attrapa son paquet de cigarettes sur le bureau, se plaça devant la fenêtre,
alluma le rouleau et se mit à scruter l’extérieur, songeuse. Elle savait que le
temps était venu de tout lui dire. Elle se sentait prête. Et elle le fera le
matin venu, pensa-t-elle. Espérant ne plus sentir ce poids qui pesait sur sa
vie. Ses yeux se posèrent sur lui, il semblait serein, paisible en paix.
Il devait être près de midi quand enfin elle ouvrit les
yeux. Sa nuit fut longue et ce n’est qu’au levé du soleil qu’enfin elle avait
pu fermer les yeux. Bruno avait déjà pris le petit déjeuner sur la terrasse et
parut content de la voir arriver en baillant.
- C’est la première que tu te lèves aussi tard, lança-t-il
avec un large sourire.
- Bruno, il faut que je te parle…
- Oui, bien sur ma puce, je nous prépare juste un verre et
te rejoins !
Il ne lui avait jamais vraiment posé de question sur sa vie,
son passé ou qui était le père d’Aaron, il savait être discret et surtout il
avait toujours respecté ses silences. Il s’installa face à elle et lui tendit
un café en lui disant :
- Je suis tout à toi.
Ambre prit une grande respiration et dans un murmure
lança :
- Te rappelles-tu, le soir où nous étions chez Martine de
l’homme qui est passé la voir ?
- Tu parles du type, comment s’appelle-t-il déjà ?
- Robert ! C’est le père de notre petit Aaron !
Elle lâcha cette nouvelle si brutalement, qu’elle put
constater, qu’il était sous le choc. Il ne disait rien, juste un regard
surpris, au bout de quelques minutes, il répondit juste :
- Comment as-tu pu me cacher une chose aussi importante ?
- Je suis désolée…
- C’est moi qui le suis, pour t’avoir fait confiance alors
que tu ne la méritais pas !
- Je t’en prie ne parle pas ainsi…
- J’ai aimé cet enfant comme le mien ! Je t’ai aimé, toi,
parce que j’ai toujours pensé que tu étais la femme de mes rêves, la femme
parfaite, la femme la plus honnête que j’ai pu jusque-là rencontrer dans ma
vie, et là, j’apprends que nous avons bâti une vie de couple basée sur des
mensonges et ça depuis le premier jour ?
- Je ne t’ai pas menti, j’ai juste enterré une partie de ma
vie, que je ne voulais en aucun cas déterré ! Je sais que tu es déçu et blessé,
mais sache que tu es la dernière personne au monde à qui je voudrais faire du
mal.
- Sait-il qu’il a un fils ?
- Non ! Il m’avait quitté avant que je ne puisse le lui
dire. Et je n’ai pas trouvé l’utilité de le faire par la suite ! À cette
époque, il était marié, nous étions follement amoureux l’un de l’autre, puis un
jour sans aucune explication, il est parti !
- Tu étais enceinte de combien de mois ?
- De quelques semaines !
- Qui est au courant de cette histoire ?
- Il n’y a que Martine… Et toi maintenant, répondit-elle tristement.
- Ça a dû être très dur… Tu as une énorme force en toi, mais
je ne sais pas si le fait d’avoir dévoilé tout ça va pouvoir alléger tes
souffrances maintenant… Ils ont le droit de savoir ce secret. Je parle de cet
homme et d’Aaron…
- J’ai essayé, mais le moment n’a jamais été le bon, puis à
quoi ça servirait aujourd’hui ? Le mal est fait !
- À réparer tes erreurs ! rajouta-t-il en la regardant
froidement. Tu nous as à tous menti, tous ceux qui croyaient en toi, en qui
nous avions tant d’admiration, tu as été un modèle pour moi durant des années,
je ne cautionne pas ton geste, et pour la première fois depuis que l’on se
connaît… Je ne te suivrai pas dans ta façon d’agir, tu devrais réfléchir aux
conséquences que ça apporterait : si, un jour, ils en venaient à le découvrir !
Au fur et à mesure qu’il parlait, elle découvrit un nouvel
aspect de l’homme qui avait été jusqu’ici le plus doux, le plus compréhensif et le
plus respectif à son égard, elle ne pu retenir ses larmes si longtemps
retenues. Il se leva, et lui dit avec une voix plus tendre :
- Je suis désolé, mais j’ai besoin de m’éloigner, de
repenser à ce que tu viens de me dire, le plus calmement du monde, je ne veux
pas faire de jugement ni même me mettre en colère contre toi, le mieux est que
je parte quelques jours.
- Je t’en supplie ne me fais pas ça, reste s’il te plait…
- Je ne pense pas que ce soit une bonne solution, le fait de
partir ne veut en aucun cas dire que je vais te quitter ! Enlève-toi cette idée
de la tête, rassure-toi, je t’aime bien plus que tu ne l’imagines !
Ils avaient parlé pendant une heure, ou plutôt Bruno avait
parlé et elle avait écouté. Elle avait
écouté parce qu’elle avait besoin de ces moments là, ces moments où,
contrairement aux autres, il lui disait réellement ce qu'il pensait, il ne
passait pas par quatre chemins, il ne cherchait pas à l’attendrir, ou à lui
trouver des excuses, il ne faisait que dire ce qu'il pensait et dans le monde où ils vivaient la
sincérité ne faisait pas de mal... Et il était surtout le seul à ne pas lui
donner de conseils, et la laisser faire comme bon lui semblait, il ne lui
faisait pas la morale... Non, Bruno lui donnait son avis et c'était ensuite à
elle d'aviser... Elle avait besoin de
ça, et surtout de faire le point.
Accoudé à la rambarde de la terrasse, fumant une de ces
cigarettes qui l'apaisaient, les yeux dans le vague à ressasser le passé. Elle
tirait une dernière taffe, écrasa sa cigarette et rentra dans ma chambre lui écrire…
Parce que comme toujours… elle en ressentait le besoin.
4
Février 1994
Cher Robert,
Aujourd’hui,
j’ai tout dit à Bruno… Et je n’ai pas arrêté de me remémorer
ce qu’il m’avait dit, ses mots résonnent encore moi, je sais qu’il a raison, et
je sais aussi au fond de moi que j’ai été égoïste, que nôtre histoire, je l’ai
gardée pour moi toute seule, je ne voulais la partager avec personne. Il n’est
jamais facile de se rendre compte qu’on a pu faire autant de mal, quelle
différence entre moi et toi qui, toi aussi, avait caché des secrets à ta
famille ? Inconsciemment nous avons voulu protéger ce qu’on éprouvait l’un pour
l’autre secrètement !
Il n'a pas dormi ici, il m'a simplement laissé un mot que j'ai
retrouvé en rentrant, un mot voulant tout dire... Tu sais, je crois qu'il a
senti que cette soirée serait le tournant d'une vie, la mienne, la sienne, la
nôtre. Il était conscient de perdre une osmose, une connivence qu'il a mis des
mois à fait naître, une femme amoureuse... Il se savait perdant et son mot
n'est que la preuve qu'il accepte qu'un autre dirige la partie, le fasse gagner
ou perdre, lui donne tout ou rien... Il a accepté que tu contrôles notre vie,
notre couple... Il a accepté...
Son mot :
« Cette nuit sans moi t'aidera à faire le point... Je reviendrai dès que j’aurais les idées plus claires » En espérant retrouver ma Ambre. »
« Cette nuit sans moi t'aidera à faire le point... Je reviendrai dès que j’aurais les idées plus claires » En espérant retrouver ma Ambre. »
Tendrement Bruno.
Je n'ai pas vraiment dormi, entre somnolence et réflexion ;
j'ai essayé vainement de me faire à l'idée, d'apprécier la réalité et ne plus
follement aimer mon passé, j'ai tenté de ne voir que le bon côté, de mettre le
mot fin sur notre histoire, de la conjuguer au passé, de fermer le livre et de
simplement chérir son existence. J'ai voulu écrire une nouvelle page de ma vie,
mettre son nom puis le mien et nous laisser le temps de s'aimer à en perdre la
tête, j'ai pleuré l'être que je suis, trop peu reconnaissante de son amour,
trop peu satisfaite de sa vie et des choses que j’ai vécues. J'ai détesté cette
petite égoïste que je suis, je m'en suis voulu de lui avoir fait subir ça. Je
m'en suis voulu de ne pas lui avoir parlé de toi, de ne pas lui avoir expliqué
qui tu es, ni même ce que nous avons vécu, je m'en suis voulu d'avoir fait
l'impasse sur toi, rien que pour vivre tranquillement dans ma tristesse. Je
m'en veux encore, de n'avoir pensé qu'à moi, qu'à toi mais si peu à lui...
Je t’avoue que j’ai essayé de trouver une alternative, un
remède, une infime chose qui pourrait apaiser la souffrance, tenter de me
consoler, d'apprivoiser le manque, la solitude. Chercher de vaines excuses,
apprendre à vivre, estropiée, handicapée, souffrante, asphyxiée... En aimer un
autre et vivre dans un présent, fade, triste, si peu passionnel, ennuyeux...
Mais vivre, vivre et mentir, mentir et aimer, aimer et haïr. N'être que le
contraire de ce que je suis, et vivre... Pour lui, pour moi. Pour ce que je ne
suis pas, ce que j'étais... Ce que j'aimerais être. Mais stopper la course
effrénée des ces souvenirs, d'un passé douloureusement bon, arrêter les
regrets, la recherche excitante d'un être, acteur d'un passé révolu, ombre d'un
présent bel et bien existant...Et vivre... Sans se retourner, sans chercher à
comprendre, ni même partir à la recherche de causes. Vivre sans en demander
trop, se contenter du peu, de l'acceptable. Et l'aimer lui. Bien moins, bien
plus mal, bien plus normalement que je ne t'ai aimé toi. Mais l'aimer lui, seul
lien me rattachant à la réalité, seule personne m'empêchant de sombrer.
Inscription à :
Articles (Atom)