mercredi 10 mars 2010

Le coeur serré

                                                                                    






Ambre ne voulait pas le forcer, elle avait préféré attendre qu’il soit prêt !

Elle avait fait une grave erreur, elle aurait du tout lui avouer, ce n’est qu’après les dégâts que peuvent causer les secrets qu’on se rend compte qu’en un rien de temps, tout peut chavirer…

Les promesses s’étaient envolées, les « je t'aime » étaient devenus superflus, les marques d'affection des choses calculées, forcées... Ils avaient fini par se détester à s'en faire mal, à se détruire... Tout s'était effrité sous leurs yeux, surpris de voir que la difficulté pouvait les frapper, de voir qu’ils n’étaient à l'abri de rien... Ils avaient fini par faire l'amour parce qu’il aimait ça, parce qu’il en avait besoin ; ils avaient fini par jouer un double jeu, les silences à deux... Ils avaient fini par être une pâle copie de ce qu’ils redoutaient, et même avec une vie aussi remplie que celle de Robert, qui était devenue celle d’Ambre, la routine s'était installée... Et ils avaient sombré.

Ils auraient pu rester des années comme ça, à se mentir, à ne pas regarder la réalité en face et se bercer d'illusions ; elle pensait qu’ils auraient pu tenir toute une vie comme ça... Parce que malgré tout, ils s’aimaient, et avaient ce besoin constant l'un de l'autre... Ils s’aimaient bien plus encore sûrement,  que la situation dans laquelle ils étaient.

Et un soir, elle le vit s’approcher du lit, et fit semblant de dormir. Elle ressentait que ce qu’il  avait à lui dire était très important, et qu’un problème l’étouffait. Elle pouvait le ressentir. Inconsciemment, elle savait qu’elle le perdait, mais elle ne voulait en aucun cas l’entendre le lui dire.

Il n’avait pas dormi de la nuit ainsi que Ambre ! Elle l’entendit pleurer et elle n’avait pas la force de bouger, ses sanglots résonnaient dans sa tête ! Un appel, une prière pour qu’elle réagisse et qu’elle l’aide à se délivrer du poids qui le rongeait. Ambre, anéantie, s’en voulait de ne pas avoir eu ce courage : celui de le retenir… Car c’est bien ce qu’elle avait redouté, qu’un jour il lui dise qu’il fallait qu’il s’éloigne d’elle. Au fond, elle l’avait toujours su que cet instant arriverait… Mais elle avait toujours aussi su qu’il lui dirait qu’il reviendrait… Et ça, elle ne pouvait l’accepter… Chacun d’eux portait un secret en lui, ils n’avaient pas su en parler, la peur de se faire du mal, la crainte de devoir affronter le regard de l’autre, d’assumer ces choix… Et pourtant, ça les concernait tous les deux et leur vie commune.

Au levé du soleil, elle l’entendit préparer sa valise… Il s’attarda un peu dans la cuisine. Inquiète, elle se leva. Robert était assit tenant dans sa main une lettre qu’il referma. Et elle comprit que les mots écrits de la main de l’homme qu’elle aimait la plongeraient dans une tristesse à en mourir… Car ils ne pouvaient contenir que les vérités qu’elle se refusait d’admettre ! Elle retourna sans faire de bruit dans son lit. Recroquevillée, pleurant toutes les larmes que jusqu’à présent elle avait péniblement eu du mal à contenir.

Silencieusement, son ombre passa le pas de la porte...

Ce soir là, fut le dernier...

Elle s’entendit encore intérieurement crier, hurler, le suppliant de revenir… Mais pas un son n’avait pu sortir… Tous les mots étaient resté en elle. La lettre resta quelques heures sur la table de la cuisine où il l’avait déposée sans qu’elle puisse y toucher. La prenant dans ses mains tremblotantes, ses larmes avaient coulé, quelle ne fût pas sa peine en constatant le contenu : des excuses sans explications ! Juste de banals « je suis désolé, mais je dois gérer une autre partie de ma vie dont tu ne fais pas partie » et la phrase qui tue « je te reviendrai dès que j’aurais tout réglé ». Elle l’avait haï, elle l’avait maudit de l’aimer autant.

Et elle plongea dans la plus noire des périodes de sa vie, l’enfer, le dégoût de tout, l’envie de se foutre en l’air, pour elle tout s’était arrêté sauf ce besoin de le pleurer, pleurer sa vie et cette horrible nuit où, aujourd’hui, elle le regrettait de ne pas lui avoir tout dit.



Ambre ne dormait plus, ne mangeait plus, ne vivait plus ! Restant des heures dans le noir où, dans ces moments, il lui revenait en mémoire, en ayant ce mal de chien, ce mal qui est en nous et, quoi que l’on fasse, ne passe pas, ne guérit pas, ne s’oublie pas. Ces larmes versées dès qu’il venait dans ses pensées, ce besoin de lui, d’entendre sa voix, ces bruits de pas entendus en espérant à chaque fois que c’étaient les siens.
                                                                                                                                                                  Ils auraient dû parler… Elle se souvint de ce jour où les non-dits auraient du éclater, les reproches les gifler... De ce jour, où aucun mot n'avait pu embrassé leur bouche, où aucune larme n'avait lacéré leurs joues... De ce jour, où le silence avait pris possession d’eux… Elle se souvint de ce jour où la fin avait sonné… De ce moment qu’elle avait tant redouté, de ce fichu jour où il était parti sans se retourner... Elle s’en souvint, comme si c'était hier...

Elle se souvint bien plus encore de sa haine à la vue de ces quelques mots. De voir qu’il n'avait en aucun cas pris la peine de l'appeler après plusieurs semaines de silence, du peu de respect qu’il lui portait. Elle l’avait haï, de la traiter de la sorte...  Elle se détesta ce jour-là, elle se détesta pour tous ces espoirs qu’il avait formulés, pour ces sentiments si mal contrôlés, pour son côté naïf qu’elle avait, auparavant, réussi à maîtriser. Elle se détesta de l'aimer, alors qu’elle avait conclu un pacte avec son cœur et sa raison. Elle se détesta d'avoir perdu, d'avoir été si faible. Et ce jour-là, à cet instant précis, elle s’en voulu de l'avoir rencontré.

Elle n’avait pas vu les jours s’écoulaient, elle ne faisait que réfléchir, essayant de peser le pour et le contre, de faire de la situation quelque chose de comique, d'en rire, de n'en prendre que les bons côtés, de ne plus penser à ce qu’elle pouvait bien ressentir. Elle essayait de croire qu’elle pouvait lui résister ou mieux encore, que si elle décidait de le rejoindre, il ne lui aurait été en aucun difficile de contrôler l'amour qui avait pris possession d’elle. Qu’elle pouvait être plus forte, qu’elle valait bien mieux que cela, et que sa fierté lui donnerait la force de lui sourire, de taire ce qu’elle aurait désiré crier...

Elle eut tellement de regret, pour celui qu’il avait été jadis, pour ce qu’il avait fait naître en elle. Pour ce sourire, cette beauté presque aveuglante, pour ce corps et l'odeur qui s'en dégageait, pour ses mains au creux de ses reins, pour sa bouche contre la sienne, pour cette domination qu’il exerçait si bien sur elle. Cachant habilement l'amour derrière cette haine qu’elle s’était confectionnée. Elle s’était époumonée à croire qu’elle était bien plus forte que ce qui résidait en elle, qu’elle pouvait habilement tuer ces sentiments, ces sensations. Elle se pensait bien plus forte, bien moins amoureuse.                                                                                    

Mouna Toujani               


 
     
                                                                      

2 commentaires:

Anonyme a dit…

à te lire, viens une irrésistible envie de sécher les larmes qu'un inconscient a mis dans tes yeux ... ♥

Anonyme a dit…

... et de te réchauffer le ♥